Connaissance et usage des Dictionnaires

Bien connaitre, mieux utiliser votre « dico » familier

Une lecture : Jean PRUVOST, Les dictionnaires français. Outils d’une langue et d’une culture. Ed. OPHRYS, Paris, 2006, 198 p. ISBN 10 : 2-7080-1143-X.

Pour votre pratique quotidienne de la langue, vous disposez d’un dictionnaire (et vous le consultez… souvent ? assez souvent ? assez peu ?) – C’est sans doute un des plus répandus, en un volume. Un de ceux qui sont recommandés aux élèves des collèges et lycées. Car l’édition française en propose plusieurs, qui ont le mérite d’être fréquemment réédités, donc bien tenus à jour. A notre époque de mondialisme et d’échanges internationaux, la néologie est intense et la première caractéristique de votre dictionnaire est son âge, sa date d'édition. Mais il a d’autres caractéristiques que vous ne constatez qu’accidentellement.

Cette première partie est consacrée à une étude nouvelle : celle de Votre dictionnaire, de ses ressources et de ses qualités (qui varient d’un ouvrage à un autre), de sa meilleure utilisation…

Savoir lire et utiliser votre dictionnaire

Vous avez le choix, chez votre libraire ou dans la grande surface, entre plusieurs Dictionnaires (de langue française) en UN VOLUME. Bien que leur « nomenclature » se ressemble, leur contenu est très variable (et leurs prix aussi !).

Leur « nomenclature », cela signifie la liste (alphabétique) des mots qui y sont traités. Si vous voulez vous en assurer, prenez une suite de mots : par exemple de DIRE à DIRIGER. Il y aura peu de différences dans les « entrées », peut-être aucune. Mais le contenu et la longueur des « articles » seront sans doute très variables.

POURQUOI ? Parce que chacun de ces ouvrages repose sur des CHOIX.

VOCABULAIRE

Et d’abord, notons que le « dico », comme tous les objets que notre civilisation vous propose, a son vocabulaire technique : nomenclature, entrée, article sont des termes techniques dont il est prudent de connaître le sens précis et l’emploi

Au passage, nous allons rencontrer d’autres termes que l’utilisateur d’un « dico » doit manier avec compétence.

LES CHOIX

Comme tous les livres que distribue le libraire, le dictionnaire a un éditeur, et un auteur, ou plus généralement une équipe d’auteurs (des linguistes, ou des pédagogues). Les auteurs ont beaucoup de connaissances à offrir à leurs lecteurs, mais l’éditeur est obligé de limiter l’étendue du volume (dont dépend le prix), et de faire des choix de présentation : (lisibilité ? typographie et mise en page ? illustrations ? ...) ; des choix qui déterminent le prix de vente du dico.

Auteurs et éditeur se sont donc mis d’accord sur le contenu et la présentation de l’ouvrage, qu’il faut adapter au public auquel ils le destinent.

ENCYCLOPEDIQUE ?

Ce qu’on nomme « dictionnaire de langue » est généralement monolingue (les « bilingues » annoncent cette qualité dans leurs titres). Et il n’est pas « encyclopédique » : il présente le langage (les mots, les phrases…), mais non les choses. Il définit, mais ne décrit pas ; ou plutôt il ne donne, de la description, que ce qui suffit pour distinguer un signifié de tous les autres signifiés.

Et voici encore des termes techniques : le mot est un signifiant ; ce qu’il évoque (être, objet, qualité, action, relation...) est un signifié. Un signifié peut avoir plusieurs signifiants : ce sont alors des synonymes.

Plusieurs signifiants peuvent se prononcer de même (homophones), ou même s’écrire de même (homographes) ; ce sont deux sortes d’homonymes. Comparez « trop court », « elle court », « un cours », « la cour »… et vous réveillerez des souvenirs scolaires.

Aux limites du lexique

Pourquoi un « mot » est-il ou n’est-il pas dans nos dictionnaires ?

Exemples : « emphytéotique » est dans tous ces répertoires : mais rares sont les francophones (sauf dans les notariats) qui en connaissent ou le sens, ou l’orthographe ; « logarithme » est présent partout, mais peu de locuteurs en donneraient une vraie définition ; « week-end » est usuel chez tous les francophones, mais… « est-il français ? » Immigré il y a un siècle, mais il a conservé son vêtement étranger. Contournable, parfaitement « français », compris comme contraire d’incontournable, mais absent des dictionnaires car moins fréquent dans l’usage que son antonyme. « Esquinancie », sorti de l’usage même médical, figure encore dans le dictionnaire académique, mais a été abandonné par les autres. « Clarteux » : trop régional (Lorraine), ou archaïque, pour intéresser les lexicographes. « Grenelle », nom commun nouveau-né, néologisme, plus jeune peut-être que votre « dico », etc.

Conclusion : pour un « mot », il y a beaucoup de façons d’« exister ».

Testez votre dico !

Des tests

Cette page vous propose des tests permettant de mesurer les aptitudes de votre dictionnaire à vous renseigner sur les difficultés du vocabulaire.

Les locutions (idiomatiques)

Mon dictionnaire me renseigne-t-il sur le sens et l’emploi de ces locutions ?

1. à l’œil

2. au nez de…

3. en tête à tête

4. à pied d’œuvre

5. perdre pied

6. prendre langue (avec…)

7. au doigt et à l’œil

8. à corps perdu

9. au cœur de

10. tenir tête (à…)

La prononciation

Mon dictionnaire me renseigne-t-il sur la prononciation correcte des mots suivants ?

1. comptable

2. sculpteur

3. héroïque

4. vraisemblance

5. dehors

6. arguer

7. promptement

8. somptueux

9. hasard

10. ping-pong

NOTE : « le hasard » – mais : « l’héroïque... » - Le dictionnaire fait-il la différence ?

Dialogues

Pourquoi le : c, du mot second, se prononce : g ?

Commencez donc par consulter votre dictionnaire !

Il vous dira que la syllabe SEC– de ce mot se prononce « SEG », avec un G et non un K. Si vous en doutez, essayez de prononcer rapidement : « J’habite au second » – Tout francophone prononce alors cette syllabe : « zg ».

La vraie question serait donc : « Pourquoi ce mot, qui se prononce ‘segond’, s'écrit-il avec un « c » ?

Et la réponse est : « C’est un mot emprunté (au XIIe siècle) au latin SECUNDUS. Comme dans de nombreux emprunts savants, son orthographe est étymologique. ».

La fleur ou plante « ancolie » existe-t-elle ? Et comment celà s’écrit ? Je ne trouve pas ce mot dans le Larrousse 2007.

Corrigez : « s’écrit-il ? », Si votre Larousse a deux R, rapportez-le au libraire ! Les nôtres n'en ont qu’un, et ils contiennent tous le nom féminin « ancolie ». Dans le PLI 2009, c’est à la page 40.

Définition du mot « intellectuel ».

a) Les définitions, c’est d’abord au « dico » qu’il faut les demander, pas à Orthonet !

b) « le mot » ? – Il y en a deux : un adj. : « intellectuel, elle », et un nom : « intellectuel, elle ». Les définitions ne sont pas identiques. L’une d’elles vous convient-elle ? Sinon, précisez votre question.

Une petite question à laquelle je ne trouve pas de réponse : on parle de parricide, d'infanticide ... mais comment dit-on quand on tue un roi ?

Les dicos (récents) répondent : « -cide » qui tue.

– insecticide, parricide, fratricide, régicide…

Comment écrit-on « par la même » ou « par là même » ?

Votre dico fait la différence entre « la » (fém. de « le ») et  « là », adverbe.

« Le bateau est plus manœuvrable avec le moteur dans ce sens » ou « le bateau est plus manœuvrant avec le moteur dans ce sens ». Comment doit-on dire ? Merci pour votre réponse.

Votre dico signale « manœuvrable, adj. » mais non « manœuvrant ». Votre choix est donc facile.

J'ai appris récemment que quelqu’un qui ne boit jamais d'alcool (comme moi !) est « abstène ». Mais je ne trouve ce mot dans aucun dictionnaire et je ne suis pas sûr de son orthographe. Merci de m'aider.

Vous avez vraiment… « cherché » ? Dans n’importe quel dictionnaire, en « cherchant » ce mot (inexact), vous auriez trouvé la forme correcte : « abstème », et sa définition, qui répond à votre demande.

Dit-on « elles s’y sont mal prises » ou « elles s’y sont mal pris » ?

« ...prises ». – Accord obligatoire !

Les dictionnaires mentionnent bien l'expression « s’'y prendre à... », mais ne précisent pas toujours que SE y est objet direct, ce qui entraine l'accord du participe..

Bonjour, J’aurais voulu savoir si l’une de ces deux expressions est correcte et si oui laquelle : « Je souhaite faire profiter les enfants de mon expérience. Je souhaite faire profiter aux enfants de mon expérience ». Si vous pouvez m’aider, je vous remercie car je me perds un peu dans les exemples de tout et son contraire, pris notamment dans les discours de nos candidats à la présidence de la République...

1) «... les enfants. » : correct

2) « ... aux enfants » Non !

Plutôt que les discours, votre dictionnaire vous l’aurait dit. Mais vous avez oublié de le consulter.

Je rédige actuellement un mémoire et j’aimerai savoir si dans la phrase suivante ou prend ou non un accent ? Le traitement des escarres en fin de vie jusqu’où et à quel prix ?

Vous aimerez ??? Quand ? – OU ne « prend » rien ! « ou » et « où » sont des mots différents, et c’est à VOUS de savoir lequel vous utilisez. Votre dictionnaire est là pour vous aider.

Bonjour. Tract existe, mais que penser de tracter et tractage absents du TLF ? Merci.

Ce n’est pas dans le TLF qu’on s’informe sur les néologismes et les vocabulaires techniques. Le TLF est un dictionnaire de corpus, et ne comporte pas de mises à jour. Il n'a ni le rôle ni les moyens des dictionnaires en un volume.

Bonjour à ceux qui savent... et qui vont m’éclairer, j’espère, avant que je me fâche avec mon entourage... Dit-on « continuer à » ou « continuer de » ? Merci d’avance ! Bien cordialement.

...parce que vous êtes déjà fâché avec votre dictionnaire ? ou hostile aux dictionnaires ?...

Eux, ils ne se fâchent pas, et ils savent que... : « on dit les deux ».

Les deux dictionnaires institutionnelset un Indépendant d'avant-hier : le LITTRÉ

Le Dictionnaire de l’Académie française – De 1694 à 1935, 9 éditions.

Le Dictionnaire de l’Académie n’est pas une encyclopédie. On y chercherait vainement l’ensemble du vocabulaire des techniques et des sciences. Il est traditionnellement un dictionnaire de l’usage, qui s’enrichit à chaque édition et enregistre les modifications et les évolutions constatées.

L’édition de 1935 comptait environ 35 000 mots. La neuvième édition comportera plus de 15 000 mots nouveaux.

Dates des anciennes éditions :

1. 1694

2. 1718

3. 1740

4. 1762

5. 1798

6. 1835

7. 1878

8. 1932-35

En cours depuis 1992 : la 9e édition (4 volumes prévus)

Tome I, de A à Enz – 1992, 834 + VII p.

Tome II, de Éoc à Map – 2000, 594 + III p

(Consultables sur Internet : atilf.atilf.fr/academie9.htm) :

Tome III. Le 15 décembre 2012, a paru le tome 3. Il comporte 9 860 mots, dont 3 828 mots nouveaux.

Actuellement, de A à Préside, cette 9e édition compte 37 228 mots (ou « entrées »), soit environ 2/3 de la nomenclature prévisible, qui dépassera sans doute les 50 000 entrées.

L’orthographe lexicale en mouvement

« De sa première édition (1694) à la neuvième (en cours), le Dictionnaire de l’Académie, pilote des autres répertoires, n’a cessé de réviser, de réparer, d’améliorer l’orthographe lexicale, de corriger les tâtonnements du début et les maladresses de la suite.

Parmi les mots du début (moins de 20 000), un tiers ont ainsi subi des rectifications ; en 1718, je sçay perd son ç, puis, en 1740, j’ai sû gagne un circonflexe, mais va le perdre, et hésitera un siècle durant entre je sai et je sais ; la veue de 1694 est devenue en 1718 vüe, puis vue (1762) ; en 1740, la verité était devenue vérité ; seur, seureté, meur, meurir avaient remplacé leur E inutile par un circonflexe ; tiens ! la coustume, qui avait été dotée d’un beau circonflexe, vient de le perdre ; en 1798,  l’imbécille perd un L (ou une L, comme on disait alors), et l’ame obtient enfin le circonflexe qui donne plus d’âme; mais ce n’est qu’en 1835 que je sais élimine enfin je sai, que les enfans prudens ont rejoint les autres pluriels en devenant des enfants prudents ; la monnoie s’est convertie en monnaie ; et tous les imparfaits et conditionnels accomplissent un vœu de Voltaire en remplaçant les –ois, -oit, oient , etc., par –ais, -ait, -aient, etc. En 1878 le collége est devenu un collège, et le poëte un poète ; c’est depuis 1932 que la grand’mère s’écrit grand-mère, et que le nénufar s’est paré d‘un douteux PH ; en 2000 enfin qu’imbécillité et interpeller ont perdu un L, que l’euro a fait son entrée, mais en oubliant de révéler son pluriel, et que gageüre obtient enfin un tréma (facultatif) qui lui éviterait de rimer avec du beurre. » Ch.Muller, La langue française vue d’Orthonet, p. 157.

Le Trésor de la Langue française (T.L.F.) – Dictionnaire de la langue du 19e et du 20e siècles.

16 volumes (de 1971 à 1994) - 23 000 pages.

Ce monumental dictionnaire a été réalisé à Nancy par le Centre de recherche pour un Trésor de la langue française, organe du C.N.R.S. - Sa diffusion est assurée par les éd. Gallimard.

Informatisé, il peut être consulté sur Internet - http://atilf.atilf.fr/tlf.htm

Note : le T.L.F. contient d’importants articles sur les « formants » comme anti-, péri-, télé-, -cole, -phile, -iste, etc. Enumération de très nombreux néologismes hors nomenclature. Préfixes et suffixes ne sont pas des « mots », des unités du vocabulaire traditionnel ; leur sens est en général aussi abstrait que fluctuant ; ils n’ont pas, dans la phrase, d’emploi indépendant ; bref, pas d’ « entrées » dans les dictionnaires traditionnels.

Les choses ont changé avec l’invasion des formants. La plupart de ceux-ci étant utilisés très librement, comme -phile, -phobie, télé-, anti-, etc., et ayant un sens bien établi, ils ont obtenu leur entrée dans nos dictionnaires. Et du coup on y admet aussi les préfixes et suffixes, le tout étant classé « éléments de composition ».

L’important est qu’à notre époque, le public découvre une situation nouvelle : l’usage fait des formants un des éléments vivants du vocabulaire. Les formants peuvent entrer dans des composés nouveaux sans que ceux-ci soient déjà enregistrés par les dictionnaires ; et ce sentiment s’étend à certains préfixes ou suffixes. L’hésitation porte alors sur la façon d’écrire le nouveau composé, parfois sur son emploi, mais de moins en moins sur son « existence ». Orthonet a pu, naguère, inquiéter quelques esprits puristes en répondant : « Employez-le, alors il existera ! » – On l’admet mieux, aujourd’hui : « Entre les mots qui existent sûrement, ceux qui existent peut-être, ceux qui pourraient exister et ceux qui ne peuvent pas exister, les limites sont incertaines et mouvantes. Le lexique n’est pas un ensemble fini ».

Cela pour dire que si votre dictionnaire ignore le nom-adjectif préinscrit, ou le verbe préinscrire, il vous confirme, sous une entrée « pré- » (à ne pas confondre avec la précédente : « pré n.masc. »), l’existence d’un élément de composition que vous pouvez utiliser, et propose pour modèles quelques composés cités comme exemples : des noms, adjectifs, verbes plus ou moins néologiques, formés avec préfixation de cet élément. Ce qui suffit pour vérifier que le trait d’union devient exceptionnel, que la soudure, recommandée par les rectifications de 1990, est l’orthographe normale de ces composés, donc de celui que vous souhaitiez utiliser.

L’admission des formants dans la nomenclature des dictionnaires est utile pour les éléments préfixés comme (anti-, hyper-, proto-, télé-, supra-...), mais plus encore pour ceux qui sont postposés, comme -cole, -gène, -iatre, -phore, -thérapie, -trope, etc., dont l’ordre alphabétique disperse les produits, mais que le lexicographe peut regrouper. Dans cette voie, c’est le T.L.F. qui va le plus loin : après l’article consacré à un élément de composition, il reproduit de très nombreux composés créés par différentes disciplines, relevés dans la presse ou la documentation, mais non retenus dans la nomenclature. Ainsi pour pré-, ce sont environ 400 composés, surtout récents, qui sont ainsi soumis au lecteur.

Ces données originales, dues au dépouillement informatisé de l’énorme corpus de Nancy (plus de 100 millions de mots), donnent une image objective de la vitalité des formants, et un aspect nuancé de leur rôle dans l’usage actuel. Sont-ils propres à certaines spécialités scientifiques ou techniques, ou au contraire répandus dans l’usage général ? Avec quelles catégories (verbes, noms, adjectifs…) s’accouplent-ils le plus ? Quelle est l’orthographe des couples ainsi formés ?

Remarque

En 1971 (tome I du Trésor) acro- a fait l'objet d'un article. À l’époque, il était encore qualifié de « élément préfixé ». Devenus « éléments formants », -tonie, -trope, et d’autres sont traités en 1994 (tome 16).

Vingt-trois ans. Une génération s’est tue, une autre s’est emparée de l’usage ! La langue que décrit et qu’analyse le T.L.F. est en mouvement. Pendant la publication de ses 16 volumes, les formants ont conquis une place significative dans le mouvement du vocabulaire.

Dialogues

Est-ce que vous pourriez me dire quelle est l’orthographe correcte du nom « pré-équipement » ? Est-ce que le nom s’écrit avec trait d’union, en un mot ou en deux mots ?

Si votre dictionnaire ne répond pas, avant de poser cette question, il fallait faire un essai du T.L.F., qui vous aurait mise sur la voie : je cite :

Pré- marque l'antériorité temp.]

A. [Les mots constr. sont des subst. ; la base est un subst.]

1. [Les mots constr. désignent une période qui en précède une autre [...]

2. [Les mots constr. désignent une action ou son résultat] V. préadaptation, précombustion, prédigestion, préemption, préfiguration, prélegs, présélection, présupposition ...

Pour des composés néologiques de ce genre, qui pullulent, cette énumération doit vous suffire pour écrire :

« prééquipement »... ou plutôt : « pré-équipement ». – Sans risque grave ! Dans la néologie actuelle, aucun dictionnaire ne peut enregistrer le flot de toutes les créations de toutes les techniques. De bons exemples (ce qui fut la règle des équipes de Nancy attelées au TLF) doivent suffire pour pratiquer une néologie raisonnable. – Fréquentez le TLF. Il vous accueillera de son mieux.

Un indépendant – Le Littré

À côté des deux grands dicos « institutionnels » (donc rédigés et diffusés à l’initiative de l’État), d’autres dictionnaires de langue sont publiés : au 17e siècle, ceux de Richelet et de Furetière ; au 18e, les Trévoux, puis l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert ; au 19e, de très nombreux et très ambitieux dictionnaires, dont ceux de Pierre Larousse (linguistiques et encyclopédiques) et de ses continuateurs, mais particulièrement celui d’Emile Littré, qui a eu un immense succès, et qui, pendant un demi-siècle, a exercé une réelle autorité. Reste précieux pour le vocabulaire des 17e et 18e siècles. Encore souvent consulté et cité, il méritait une place dans notre information.

Emile Littré (1801-1881) rédige les 4 volumes de son dictionnaire entre 1863 et 1877 ; ils sont publiés par son ami Hachette. C’est une époque où l’Académie (dont Littré est membre à partir de 1873), prépare sa 7e édition. Après la publication de cette édition, c’est un demi-siècle (1878-1935) sans mise à jour du vocabulaire, sinon par les encyclopédiques de Larousse. Pendant cette période, le Littré faisait autorité. On répétait que « ce qui n’est pas dans Littré n’est pas français », alors que la langue s’enrichissait de l’automobile, de l’aviation, du cinéma, du téléphone… et d’une guerre mondiale.

Depuis qu’il est dans le domaine public (vers 1950), le Littré a eu plusieurs réimpressions, mais sans mise à jour. On le consulte dans beaucoup de bibliothèques, et il est disponible en cédérom. C’est un sérieux inventaire du vocabulaire d’avant 1880, et surtout une très riche description de la langue littéraire française… de Louis XIII à Louis-Philippe.

Mais il est vain de s’y référer pour la langue du XXe siècle.